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Nos sentiments

Publié le par drink 75

 

Je me souviens des maux alignés les uns a côté des autres, je me souviens. On pense que tout est définitif car on sait bien que ça n'existe pas. Comme le brouillard définitif. Ca n'existe pas. Les mots gravés. Il me semblait que ça ne changerait pas. Non par ce que les choses ne changent pas, mais tout simplement car elles sont ainsi. Je pouvais jouer la comédie, vivre des milliers d’autres vies, attendre que la nuit me recouvre. Je pouvais mourir mais je ne pouvais rien oublier. C’était ainsi. La prégnance de sa présence ne manquait pas de m’étonner alors même qu’elle n’était plus là, alors même que j'avais tout perdu, les souvenirs, l’appartement et tout le reste, Il semblait que ça ne changerait pas. C’était juste ainsi. Et la vie semblait couler aussi surement que le titanic. Dans les vies qui s'effacent, dans le songe qui remplace la réalité, au milieu des autres mais tellement loin. Loin de toi. Je me souviens des souvenirs alignés comme des trophées, au milieu de la bibliothèque mentale qui me sert de lieu de vie. Je laissais défiler des photos, Je m'allongeais sur des pelouses de songe. J'étais parmi les ombres et les souvenirs. Et puis...Tu m'as tendu la main et je l'ai attrappé. Je pensais que tu allais trébucher et que tu me demandais de te retenir, en souvenir de ce qui fut. Mais ce n'était pas ça. C'était quelque chose qui n'existe pas. Car nous vivions quelque chose qui n'existe pas. Qui n'est pas repertorié dans les livres. Que l'on apprends pas à l'école. Tu t'es assise a côté de moi et tu m'as juste dis que c'était comme ça. Qu'il ne fallait pas chercher a comprendre. Tu m'as dit, je me lève et je descends du car si tu ne veux pas que je reste. Je me suis demandé si tu irais t'asseoir a d'autres places de temps en temps mais je n'ai pas osé te demander. Je me suis posé des centaines de questions. Mais tu es resté assise. Tu as enlevé l'accoudoir qui séparait nos deux sièges. J'ai décidé de ne plus me poser de questions. Tu semble plus légère. Tu es plus légère. J'ai pris ta main. Tu m'as souri avec bienveillance. J'ai pensé que tout était bien. Je ne sais pas ce que nous vivions mais tout était bien. Tu m'as souri et toutes mes questions se sont effacées.

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Après la chute

Publié le par drink 75

 

J'ouvre un oeil. Mon corps n'est que lambeaux. Mon âme est éparpillée un peu partout. Le soleil traverse les rideaux. Un corps ronfle quelque part. J'essaie de rembobiner le film. La veille.  Un mois que je cherche a comprendre ce qui m'arrive et il faut bien avouer qu'il ne m'arrive pas grand-chose. Je fais comme on fait quand on ne sait pas quoi faire d'autre, je fuis. Porto est une de mes villes préferées au monde, Je suis content de m'y retrouver. J'ai trouvé un appartement près du centre. Dans une petite rue qui descend vers la gare. J'ai toujours aimé le portugal, dès le départ, les pays c'est comme les villes, tu ne peux pas toujours expliquer les raisons mais  c'est preque immédiat. J'aime pas l'espagne, j'aime pas l'italie, j'aime pas londres. J'adore le portugal, j'adore bruxelles, j'adore liège. Je lance une petite bouée au fantôme en arrivant a porto. Je lui demande ce qu'elle veut comme cadeau, je ne me souviens plus précisément, ou je lui dis que je vais lui envoyer un cadeau. Elle me réponds non mais ça va pas la tête. Je me demande ce qui me prends. Je crois encore que ce n'est pas réel. Je veux lui envoyer une carte mais je crois que je ne le fais pas. Je me promène dans porto, je longe jusqu'a la mer. C'est beaucoup construit depuis la dernière fois que je suis venu. Le soir, je descends jusqu'au Douro, vers ce qui est pour moi le meilleur panorama de porto. Au bord du fleuve, a la fraîche, sous le pont construit par eiffel. Je commande une bouteille de vinho verde et j'attends qu'il ne se passe rien, espérant que la nuit va peu a peu recouvrir mon âme. Je ne suis pas malheureux a cette époque, je suis anesthésié. Comme évadé de moi-même, inconnu de mon propre moi. Il n'y a personne à l'adresse indiqué.  A la seconde bouteille de vinho verde, je discute avec deux portugaises. L'une semble un peu au bout de sa vie et ne parle qu'anglais avec un accent prononcé, l'autre parle français, plutôt pas mal. On parle anglais pour ne pas que celle qui ne comprends pas le français ne fasse pas encore plus la gueule, même si elle ne participe pas à la conversation. Elle est sur son téléphone. Le regard figé dans l'écran, noyé, comme si elle attendait qu'il en sorte quelque chose. Aujourd'hui encore je suis incapable de me souvenir de son prénom. L'autre fille s'appelle paola, elle connait bien bordeaux, ville que je ne connais quasiment pas, j'évite de lui dire que la seule fois que j'ai mis les pieds a bordeaux c'était au milieu fin des années 80 pour un concert de marc seberg au chat bleu, avec litfiba en première partie il me semble. Elle me prendrait pour son grand-père. A la troisième bouteille de vinho verde, la fille toujours sur son téléphone dit un truc en portugais à l'autre. L'autre se marre, hausse les épaules. Elle lui dit sans doute, qu'est ce qu'on fout avec ce vieux, dès qu'on a fini de picoler, on se casse. Je le comprendrai en plus. Il y a une soirée me dit paola, une grosse soirée avec des djs et tout, en centre ville, ma copine se demande si tu pourrais nous faire rentrer. Je la regarde avec mon air idiot, enfin mon air naturel un peu embrumé à l'alcool, et je reponds que je ne connais personne a porto, et que j'ai pas de contact pour les faire rentrer. Elle se marre. Elle répète ce que j'ai dis a l'autre fille qui à l'air de ne pas en revenir et me regarde comme si j'étais le plus gros débile rouquin qu'elle est n'est jamais rencontré. Est-ce que tu peux nous payer l'entrée ? dit paola vu que mézigue est long à la comprenette. Bien sur je dis, vu que j'ai décidé de claquer tout mon argent avant de mourir, je n'y vois aucun inconvénient. On mange pas très loin du rade, dans un restaurant pour touriste un peu vide vu qu'on est fin janvier début février, et puis on prend un taxi pour aller au lieu du concert. Je m'attendais a un petit club, on se retrouve devant un lieu assez grand, il y a pas mal de monde dehors. On fait la queue et je paie. Le fait d'avoir mangé me permet d'avoir un peu décuité même si on a bu pas mal de vinho verde a table. La salle est assez grande, je pense qu'on est plusieurs milliers, c'est un genre de petit zénith, il n'y a que des jeunes, je pourrais être le daron de tous les gens présents. Un dj sur scène diffuse une musique un peu vieillotte. Paola me dit qu'on est venu pour voir w and w, deux djs néerlandais qui vont jouer plus tard, quand je lui dis que je ne connais pas elle me regarde comme si j'étais un martien débarqué sur terre. Je paie des bières, je m'attends a ce que la fille dont je ne me souviens pas du nom disparaisse et que paola reste avec moi mais c'est l'inverse qui se produit. Paola disparait en disant a plus tard, et je comprends bien qu'a moins de la croiser par hasard je ne la reverrais pas, tandis que l'autre se colle presque a moi et me demande de lui garder sa veste. Après je dois aller avec elle aux toilettes, je comprends peu a peu que la fille est complétement flippé de se retrouver là. Elle est tout le temps sur son téléphone comme si elle avait un rendez vous en suspens. Elle me dit que paola est parti rejoindre son petit ami pour bien me signifier qu'il n'y a aucun espoir. C'est curieux je me dis, j'ai pas du tout payé en espérant quoi que ce soit, j'étais seul puis j'étais avec elles, maintenant je suis avec elle et bientôt je serais seul. Un autre dj déboule et la musique est toujours aussi chiante, en fait, c'est une immense boite de nuit le truc. L'autre m'embarque vers les chiottes. Un type arrive devant nous, un peu plus vieux que la moyenne, beaucoup plus jeune que moi, la fille dont je ne me souviens pas le nom lui donne un billet et en échange il lui tends un sachet. Ils sont pas discrets ou alors ils s'en foutent. Je sais gré a la fille de ne pas me faire payer sa drogue. Le mec nous salue après que j'ai décliné sa proposition de me refiler sa merde, qui doit être du speed surcoupé et je me rends a quel point je suis débile et que j'aurai du comprendre depuis le début que c'était un plan deal. La fille disparait dans les chiottes. Elle est beaucoup plus détendue un peu plus tard je comprends que c'est une camé legère. Noir. Les dj's néerlandais sont sur scène et c'est un peu plus le bordel, je suis au bar, je parle avec un type qui est aussi défoncé que je suis ivre, qui parle aussi bien l'anglais que moi le portugais, on va aller loin. Noir. Je roule une pelle a une fille. Son haleine a goût de vomi. Noir. Je me vois payer des verres au bar, je suis avec une fille qui parle français comme une française. Noir. Le taxi fait la gueule car on est déchiré et c'est l'aube. Je lui donne 20 euros pour faire un trajet de 5 minutes ça le détend. Noir. Il y a une fille qui semble morte dans le lit près de moi. Les ronflements viennent d'ailleurs. Une autre fille sur un canapé. Je me réveille dans l'après-midi, tout habillé de la veille, la fille dans le lit n'est plus la. Je vais pisser. Il y a du vomi dans la baignoire que je nettoie avec le pomeau de douche avant de me pencher et de laisser ma tête 10 minutes sous le jet glacée. Je vais me recoucher. Noir. Presque le soir, je bois un café avec la fille qui ronflait sur le canapé, elle est française. Elle semble surprise quand je lui demande s'il y avait une autre fille avec nous car il me semble que j'ai vu quelqu'un dans le lit. Elle s'appelle éloïse. Putain t'étais chiant, elle me dit tu m'appelais par un autre prénom. Elle le cite. Rien a voir elle dit. C'est le prénom du fantôme je lui dis pas. Tu m'as saoûlé. En plus je te demandais de m'héberger, tu me faisais des grands discours que tu voulais pas coucher avec moi. Que ton corps était réservé. Non mais t'es con ou quoi ? Moi non plus je voulais pas coucher avec toi. Elle se tire un peu plus tard, semble furibarde. La nuit tombe sur Porto, je me dis que la vie va être longue. Très longue.

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En allant vers la lumière

Publié le par drink 75

 

Je descends du bateau et je vais vers le rade. Je suis énervé. Tellement furax. J’ignore pour quelles raisons la fantôme m'a raconté ses dernières aventures au rade mais je me sens prêt a tous les buter. J'arrive devant et je fume comme une centrale à charbon. Juste avant de pousser la porte qui d’ailleurs n’est pas bien fermée, j’entends le vieux collé au comptoir qui parle a une petite assemblée. Il parle fort car il est un peu ivre.  "Il est trop idiot le capitaine, elle l’appelle, il arrive ventre a terre en se disant tiens on va remettre le couvert sauf qu’elle voulait juste le revoir, elle a tourné la page, elle est passé a autre chose, mais lui non, et ce crétin y a cru, il s'est cru dans un film hollywoodien. " Le vieux et le serveur se marrent.  Et aussi un ou deux joueurs de cartes. La vieille est assise dans son canapé, fumant et sirotant un alcool fort. C'est la seule a ne pas rire. Avec le petit magicien. Il est collé au bar lui aussi, mais semble curieusement rester circonspect. "Vous avez tort je crois, elle est dingue, elle a toujours été dingue, je ne suis pas sûr qu’elle-même connaisse la raison de son retour." Il me surprend agréablement. Je me prépare a entrer pour jeter un froid glacé, comme du givre, avant de tous les fumer. Le magicien reprend. "Le capitaine au fond il me fait de la peine, vraiment, il n’a jamais trop su ou il en était mais là on dirait un poulet sans tête. Il va repartir encore plus déprimé qu’il n’est venu. Je me demande si je dois rester encore a écouter les analyses conjugales des piliers de comptoir ou si je dois rapidement les buter comme je m’y étais préparé. "Il parait que son bateau n’est même plus son bateau. Il l’a vendu et il est obligé de le louer." Je ne sais pas qui a lancé cela, ils sont encore en-dessous de la réalité je ricane. Le serveur ajoute sa petite pierre a l'édifice, visiblement c'est une assemblée de copropriétaires sur le batiment mézigue. "Il est pas fait pour les relations avec les femmes le capitaine. Vous vous rappelez sa nana d'avant, la taré, un jour ils s'étaient embrouillés, le gars lui dit : je suis un être humain, je ne suis pas un punching-ball. Tout le bar tangue de rire. "Sérieusement quel type sort ça à sa nana ?". Je ricane de plus en plus méchamment, je me demande a quel moment je vais faire mon entrée en scène. "Vous avez vu que le fantôme a un chien, elle va pouvoir acheter une deuxième laisse pour le capitaine" lance le vieux et tout le monde se met a hurler de rire. J'en profite pour faire mon entrée en sifllotant, certains s'arrêtent de rire, le vieux qui est collé au bar et qui ne me voit pas arriver dans son dos, continue de se gondoler de sa bonne blague. Le serveur me fait un sourire qui ressemble a une grimace, le vieux se retourne vu que le silence a succédé aux rire, et m'apercevant, se colle au zinc et plonge le nez dans son verre. Le petit magicien, pas fou, s’éloigne un peu en regardant un point fixe au bout de la salle comme s’il venait de repérer une poussière qui trainait depuis une décennie et qui n’avait pas été récuré lors du dernier gros ménage du bar au siècle dernier. Un café je dis au serveur alors qu’il attrape un verre pour me servir une pression. Je ne loue pas mon bateau je dis au vieux qui me regarde comme si je lui parlais de la sociologie des cétacés en milieu hostile, la vente n'a pas rapporté assez et je travaille pour finir de payer au nouveau proprio ma dette. Je fais du transport de cons, je pourrais tous vous embarquer. La vieille se  marre. Bon de quoi on pourrait parler, je reprends, vu qu’on est dans une assemblée d’ultracrépidarianistes, il me semble que j’y ai ma place. Le serveur me regarde comme si j’étais taré. Le vieux assèche sa bière et se met un doigt dans l’oreille en le secouant comme un épileptique, pensant qu’il a mal entendu. J’ai réveillé le gérard majax du port qui revient vers nous avec sa baguette. Celle des tours de magie, hein, j’ai jamais vu sa tuyauterie et c'est plutôt au fantôme qu'il aurait aimé la faire admirer. L’ultracrépidarianisme, mes amis, le capitaine a raison, nous sommes en pleins dedans. Au fond, je ne déteste pas le petit magicien, je l'ai toujours trouvé un peu pénible avec ses analyses idiotes, mais je me demande s'il n'a pas autant souffert que moi du départ du fantôme. Surtout qu'il n'a pas du comprendre. Ils étaient amis si l'on peut dire, il est devenu une sorte de victime collatérale. Je bois mon café dans un silence tendu. Vous en êtes ou ? je demande. Le serveur me regarde, le vieux me regarde, le magicien me regarde. Ma troisième tournée répond le vieux. Non je demande, vous en êtes ou des préparatifs ? Je remarque le regard du serveur, il vient de prendre un shoot de 7 ans ou 8 ans en arrière. Nos conversations a sens unique, ou disons plutôt mes conversations avec lui qui avait du mal a suivre mon raisonnement. Quels préparatifs demande le vieux ? Je voulais juste savoir avant de faire sauter ce rade, et toutes les baraques autour si vous vouliez prendre quelques affaires ? j'explique. Le magicien capte, on peut pas lui enlever cela, il est plus fin et plus intelligent que les autres, vous me direz que c’est pas difficile. C’est pour cela que le fantôme l’aime bien. Elle a une appétence pour l’intelligence et comme elle vous donne l’impression que vous êtes intéressants, le magicien aime bien faire le malin devant elle. Comme elle a une grande classe et une certaine élègance, elle rends les gens meilleurs qu’ils ne sont en réalité. J’en suis la preuve vivante. C’est à cause d’hier ? demande et affirme le magicien. Ils ont été imbéciles, vous savez capitaine, les gens veulent de la cohérence, de la rationalité. Et aucun de vous deux ne l’est. Vous êtes deux atomes en fusion qui arrivent assez étonnement a se maîtriser quand ils sont ensembles mais séparés vous êtes dangereux. Elle sait se défendre, elle s’est très bien défendu. Je sais que vous êtes en colère, et pas seulement pour ça, mais ce n’est pas de tout faire sauter qui changera quelque chose. Le gars se prend pour un ingénieur nucléaire ? Je sais ce qu’il croit. Il pense que je vais faire payer mon dépit a tous ses dingos. Les merdes ca vole en escadrille hein capitaine. Tu dis ça pour vous ? je demande au vieux en les désignant avec le serveur. Non il dit, allez on sait bien que des ennuis vous sont tombés juste après la disparition du fantôme. Je hausse les épaules. Tout le monde a des ennuis. Certains en provoquent d’autres pour être sur de ne pas en sortir indemne. Je termine mon café en me demandant si ma dernière phrase n’est pas totalement ridicule. Je me demande tout à coup ce que je fais là, qu'est ce que j'en ai a foutre ? Il faut que j'arrête avec le jugement des gens, avec la norme, je quitte le rade et je retourne le bateau. Le fantôme m'attends. Tiens tu es là ? je souligne dans un éclair de lucidité. Elle me demande pourquoi je vais là-bas, elle me demande si elle doit disparaître, elle me demande si je suis malheureux, elle me demande si tout cela est bien raisonnable. Je suis vivant je lui réponds, et c'est peut-être tout ce que je demande. Et quand tu es là, aussi étonnant que ça puisse paraître, je le suis : vivant.

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La déflagration

Publié le par drink 75

Je me souviens que j'arrive au travail, une voix pleure au bout du fil, ce qui fait que je me sens mal, ce qui fait que je me sens coupable, ce qui fait que je ne sais pas quoi dire, je me souviens, une voix au téléphone, j'entends des mots définitifs, et elle raccroche presque au moment précis ou j'entre dans mon bureau. Je m'assois sur ma chaise. Je suis comme givré d'effroi, j'ai l'impression que je vais mourir et je regarde nos vies qui défilent devant l'écran éteint de mon ordinateur. J'essaie de comprendre ce qui m'arrive, j'essaie d'enregistrer mentalement la conversation que nous venons d'avoir, j'essaie d'intégrer dans mon cortex chaque mot que je viens d'entendre. La conclusion est la même. Je me lève de ma chaise et je vais aux toilettes, je fais couler l'eau du lavabo et je ne m'en mets pas sur le visage comme ils font dans les films. Je regarde l'eau couler, je devine que ma propre vie est en train de s'écouler par la tuyauterie du politburo. Je comprends que les émotions, les sentiments, tout ce qui me ramenait vaguement à la vie, est en train de me quitter. BIen sur je ne vais pas mourir, là, assis sur la cuvette refermé des chiottes, en train de regarder l'eau couler et disparaître dans un lavabo, bien sur je vais continuer de vivre, de rire, de ne pas pleurer, de baiser, de fracasser mon âme sur des murs de métal, de lancer mon corps dans des épreuves pour lesquelles il n'est pas taillé. Bien entendu. Je sors des toilettes, je rejoinds mon bureau, j'allume mon ordinateur, je dis bonjour a mes collègues qui passent, je fais des blagues et je suis drôle, je mange, je chie, je pisse. Une vie de songe. Je me convainc que je vais m'en remettre, je me persuade que je vais m'en remettre, même si mon corps est en train de se carboniser a l'intérieur.  Ma vie est une conversation téléphonique à laquelle je n'ai pas participé, ma vie est un coup de fil auquel je n'ai pas raccroché. Non, je n'ai toujours pas raccroché.

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Enfouir le passé

Publié le par drink 75

 

C’est comme une douleur. Mais c’est du désir. C’est prégnant. C’est un sentiment qui n’avait pas disparu, une douleur fulgurante, un désir comme une lame. Je me retourne et tu es près de moi, tes yeux semblent comme brillants, comme s’ils ne devaient jamais plus se fermer. Je reviens en arrière et je me souviens de cette émotion, de ma main sur ton front, comme tu étais brûlante, comme tu étais mourante, et comme j’aurais donné tout pour souffrir a ta place, comme je voulais espacer tes larmes. J’aimerais que mon cœur s’érode, que mon corps ne parte pas à l’assaut du tien. Je suis sur toi, je suis en toi, mais ce n’est pas le plus important. C’est comme si nous oublions tout, tout ce qui nous empêche, tout ce qui nous retient, les autres, nos vies, tout ce qu’on ne peut combattre. C’est comme si cet instant rendait supportable tous les autres instants. Apaisant nos tourments, nos fatigues, nos déprimes. Supporter nos errances, je crois que c’était cela qui nous retenait. Un jour, ce ne fut plus. Je me retourne et tu n'es plus là. Un autre se retourne et c'est toi qu'il voit.  Je me retourne et je ne te vois pas.

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L'usure du zinc

Publié le par drink 75

 

Vous voulez savoir ce que j'en pense ? me demande le vieux toujours collé au zinc. Je hoche la tête. Et bien je vais vous le dire ce que je pense puisque vous ne voulez pas l'entendre. Au rade du port, rien n'a changé, le soir, il y a toujours les mêmes. Moins quelques uns. Ceux qui sont morts. Les ricanements quand je suis entré, le ricanement des joueurs de cartes, le ricanement du vieux au zinc, le ricanement du serveur, le ricanement de tout le port. Non, je ne suis pas parano. Ils savaient tous que j'étais revenu, ils savaient tous que j'avais accosté avant que l'idée ait germé dans mon esprit. Une bière je demande au serveur. Vous avez rendez-vous me demande celui-ci et a peine il a fini sa phrase, tout le bar hurle de rire. Une houle de rigolade. Vous avez raison de faire les malins, je pense tout bas, on va rire quand la furie va arriver, fumant par les naseaux, vous n'allez pas rire longtemps, profitez-en les poules mouillées. La prochaine sera pour moi dit le vieux au comptoir. C'est dommage il n'y aura pas de deuxième bière, je n'en boirais qu'une, c'est vraiment dommage. Tant de choses ont changés, souligne le serveur, puis il hurle, tout non, un coeur palpite toujours sous ce gros corps bourru...Le rade bascule dans la folie, les murs résonnent tellement tout le monde se marre. Le calme revient et tout le monde fait semblant de se remettre a jouer aux cartes, aux fléchettes, a tenir des conversations d'alcooliques. Vous ne voulez pas l'entendre, reprend le vieux collé au zinc, mais vous n'étes pas vous-même. Enfin vous n'êtes plus vous même. Au bout de tant d'années, revenir ici. Ca rime a quoi ? Le serveur qui écoute la conversation, n'entame pas la phrase qu'il voulait dire, il voit mon regard et je crois qu'il a vaguement peur. Il sait que je suis un peu allumé, même s'il ne risque pas grand-chose vu que je suis a jeun. Mais ça ne rime a rien, je réponds, d'ailleurs on ne vous a rien demandé. Tout le monde suspend un peu sa conversation au cas ou je me lance dans une grande tirade. Rien n'a changé, je dis un peu plus fort pour que tout le monde entende, vous êtes morts et je suis vivant ! Je termine ma bière un peu furieux. Je m'attendais a quoi. C'est pas de notre faute si elle fait de vous ce qu'elle veut, me dit le serveur. Le vieux plante ses ongles dans le zinc, des fois que je l'emporte avec moi. Le zinc hein pas le vieux. Elle ne fait pas de moi ce qu'elle veut, je dis, je fais de moi ce que je veux. Vous êtes morts et je suis vivant, je peux comprendre que ça vous rendent aigris. Je sors du rade d'une manière ridicule et théâtrale. Alors que je rejoins le bateau, je lui demande intérieurement de rappliquer vite fait au fantôme. Car je vais pas tenir longtemps ici. J'ai plus trop le temps pour les souvenirs et les apitoiements, les regrets et la mélancolie. Je veux juste la sentir contre moi. Comme si c'était la première fois. Comme si c'était la dernière fois.

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Rester debout

Publié le par drink 75

 

Nous dévidons la pelote de nos absences. C’est ce con de Céline qui avait raison (louis-ferdinand hein pas dion), il ne reste que l’émotion. C’est tellement soudain, c’est comme une marée qui recouvre tout, absolument tout. Et comme plus rien n’a d’importance. La vie n’a pas de d’importance, le reste n’a pas d’importance, le réel, l’irréel, le non-dit, le non-vécu. Il n’y a pas de mots pour exprimer cela, parce que ce n’est jamais arrivé, et que ça n’arrivera plus jamais. On voudrait donner un sens a tout cela, donner une raison, expliquer ce qui ne se peut, sonder l’insondable. C’est pas un truc du genre, parce que c’était elle, parce que c’était moi. Ce n’est pas quantifiable, analysable. C’est un tsunami. C’est une vague qui recouvre tout. Tout. Tu sais, quand tu la vois arriver vers toi, la vague, tu as un mouvement de recul, tu te dis que tu vas courir et t’échapper. Mais ça ne sert a rien. A vraiment rien. Tu peux fuir, la vague va te rattraper. C’est ce que tu attends. Tu ne peux pas y échapper. Tu ne veux pas y échapper. C’est la seule certitude que tu aies. Tu ne veux pas t’enfuir. Surtout pas.

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Comme un mirage

Publié le par drink 75

 

C'est un peu curieux d'arriver au petit matin, le brouillard est tel, que je me demande comment quiconque peut se diriger. Je ne ressens pas d'émotion particulière, je me dis juste un peu curieusement que les choses sont à leur place. Ce n'est pas un recommencement puisque rien ne peut jamais recommencer. Jamais. Ce n'est pas la même chose, ce n'est pas différent. C'est peut-être une vie de songe. Je saute du pont de mon bateau de songe et amarre ma carcasse en bois au port de songe. On ne devine pas grand-chose, j'essaie de regarder imperceptiblement, de découvrir si l'architecture a changé, si des batiments ont été détruits., d'autres reconstruits. Je remonte sur le bateau et je reste ainsi, loin de tout, a regarder le brouillard, a regarder défiler devant mes yeux des images du passé. Je pense a repartir. C'est tellement ridicule la nostalgie, le sentimentalisme. Je suis ridicule. Ca ne me tuera pas. Rien ne me tuera. J'ai vogué, tellement vogué, pour fuir la vie, le réel et l'absence, j'ai tellement vogué et je suis épuisé. Las. Je m'enfonce dans le brouillard, j'ai pensé a cette scène, des milliers de fois, j'ai pensé a cette scène, le fantôme courait vers moi, le fantôme m'attendait devant la porte. Seul sur le pont, dans le délire de la solitude, dans le délire de l'alcool, je me suis imaginé des milliers de choses. La vie me rappelle a l'ordre, il n'y a que le brouillard qui m'attends, quelques lumières dans la rue de la soif, quelques bruits dans la rue du désir, quelques souvenirs dans la rue de mon âme. Le rade est toujours là, baigné de néant et de brouillard. La vie reste la même, c'est juste nous qui vieillissons, les jours restent figés, c'est juste nous qui trépassons. J'ouvre la porte. Le rade est vide. Je suis même étonné qu'il soit ouvert si tôt le matin. J'ai toujours pensé que les gars fermaient à l'aube, viraient les derniers poivrots insomniaques et ouvraient le soir pour l'apéro. Le vieux n'est pas au comptoir, il est peut-être mort. Un gars essuie des tasses derrière le comptoir. Ne me dit rien. Un café, je demande. Et un café pour le capitaine, se met a hurler le serveur, je sursaute. Il met en branle sa machine. On se connait je lui demande alors qu'il dépose la tasse devant moi. J'ai peur qu'il hurle de nouveau. Le vieux radote beaucoup, il répond, donc oui je vous connais. Enfin tout le monde radote dans ce trou paumé, je connais plus d'histoires sur vous que vous n'en ai jamais vécu, il ajoute. Je dépose un sucre et je remue mon café. L'imagination est toujours supérieur a la réalité. Toujours. Je remue mon café dans ce bar usé, alors qu'un type sifflote derrière moi et que la radio crache une musique insipide d'ascenseur. Le gars me regarde, bienveillant, ou peut-être avec un semblant de pitié. Vous vous attendiez a quoi ? il ne me demande pas. Je devrais revenir ce soir, je me dis, en me demandant si je ne dois pas fuir en courant. Je balance d'un pied sur l'autre en  me demandant ce que je dois faire. Un peu le symbole de ma vie. Je croise le regard du type de l'autre côté du bar. Vous êtes là pour elle, il ne me dit pas, et vous voulez avoir de ses nouvelles ? il ne me demande pas. Le capitaine, il dit, quand je vais dire ça aux autres, je vais faire mon petit effet. On pourrait faire un  selfie pour qu'on ne me traite pas de mytho il me demande ? Je le regarde, et je me dis que je suis curieusement serein. Apaisé. Tout est curieusement a sa place.

 

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La ville du silence

Publié le par drink 75

 

Je traverse la place Montparnasse. Il n'y a personne. Paris n’est pas sale, paris a toujours été sale. Il n’y a pas de problème de circulation, il y a 40 piges mon daron m’expliquait déjà qu’on prenait uniquement sa voiture le dimanche a paris. En fait Paris est vide. Un lundi matin je traverse toute la place sans être emmerdé par les bagnoles. Ensuite alors que j’enquille la rue de rennes, je me rends compte aussi a quel point elle résonne vide. Cette rue que j’ai toujours connu bruyante, trépidante, angoissante. La rue de rennes sonne creux. Un vieux con comme moi dirait que la rue de rennes n'est plus la rue de rennes depuis tati est parti. Enfin a coulé. J’arrive toujours un peu tôt pour ma journée a paris et j’en profite pour traverser une partie de la ville désormais endormie. Un lundi matin a 9 heures, la vie semble atone, la ville ressemble a un vieillard assoupi. Je prends la rue de vaugirard et je regarde le balancement fessier d’une femme devant moi. Me demandant si elle a 20, 30 ou 40 ans. A son cul ce n'est pas évident de deviner. J'ai des jeux totalement scandaleux et immoraux, quand je marche dans la rue. Je regarde le cul des filles en essayant de deviner leur âge. L'autre est plus subtil. Quand je vois une fille qui me regarde et qui basse les yeux avant que je la croise, je me mets a la fixer, et parfois au moment de la croiser elle relève les yeux pour voir la barbaque de rouquin de plus près. J'aime cet instant de malaise ou nos regards se croisent.  Je la suis un certain temps la fille devant moi, enfin disons que nous avons le même trajet, et puis nous arrivons a l’angle assas et vaugirard devant l’institut catholique de paris. La jeune femme y rentre. Je continue mon chemin vers le sénat et la place de l’odéon. Je suis sorti avec une fille qui suivait des études a la catho, c’est a cette époque que j’ai découvert son existence. J'avais jamais tilté qu'il y avait une fac catho a paris.  Je me souviens à l’époque on rentrait facilement dans tout ses endroits et elle m’avait emmené suivre un cours de linguistique avec elle. Le prof était un biographe, notamment de duras. Je l'ai revu plusieurs fois dans des émissions littéraires à la téloche. Je m’étais emmerdé en cours. Ca doit être ma seule expérience de la fac, une heure de cours de linguistique à l’institut catholique de paris. Je crois me souvenir que la scolarité coutait dans les 6000 francs, ce qui a l’époque représentait 3 mois de loyer de mon minuscule appartement de 21 mètres carrés. A moins que ce ne soit 18. Les parents de la fille étaient un peu riches comme qui dirait. Le père de la fille était alcoolique, il m’aimait bien, sa mère me regardait avec l’aménité d’un guépard qui regarde une gazelle. Elle n'aurait pas daignée me pisser dessus pour m’éteindre si j’avais été en train de cramer devant elle. On est pas restés longtemps ensemble, je me souviens qu'elle riait comme une bossu après l'amour. Après avoir dépassé le jardin du Luxembourg, je dépose gibert et boulinier, je veux pas me charger de bouquins et comme j’en ai une bonne trentaine a lire, il n'y a pas urgence, je me dis qu’après mon examen j’irais faire un tour a bookoff. Je traverse la Seine et je longe le quai. Puis je traverse la rue lobau pour rejoindre la rue de rivoli. Je passe devant saint gervais que mon père honorait de sa présence tous les dimanches soirs pour la messe de 18 heures. C’est calme, c’est si calme. Même la rue de rivoli est calme. A bastille il y a un peu plus d’ambiance, mais c’est surtout que la nouvelle organisation de la place demande pour la traverser a pied ou en voiture demande d’avoir réussi l’école centrale ou les mines. Je parviens a le faire mais je triche, je longe sur les côtés. Ensuite j’ai ma petite séance, de lumières clignotantes, et de pression bouton. J’en ressors avec une impression de fatigue, et une lassitude dans le regard. Je traverse la rue du faubourg saint antoine et je vais a book off. Je regarde les livres a 1 euro. Me voilà a cet instant de ma vie, ou je n’ai plus les moyens pour des livres a 3 euros. On y va tout droit. Je rejoins le café ou j’ai rencard avec cette femme alcoolique qui veut me remercier de ce que j’ai fais pour  elle. Rosé, café, rosé, café, rosé, rosé, café, café. Je me réveille dans le train ou le contrôleur me dit alors que je lui tends mon billet que je me suis trompé de destination. Je descends un peu plus tard, puis je prends un autre train. Je me dis que c’était pas l’idée du siècle d’attendre un mois au régime sec pour enchaîner sur quelques litres de rosé. Tramway. Je me demande si je n’ai pas bu autre chose, un alcool a la con qui m’a flingué, un truc fort et dégueulasse. Du rosé n’aurait pas pu me mettre dans cet état. Remarque, je pensais aussi que la vie n’aurait pas pu me mettre dans cet état. Cette confiance en moi, ça me perdra. Cette illusion de moi, ça me tuera.

 

 

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Au rythme du rien

Publié le par drink 75

 

Longtemps, j'avais cru que l'écriture était une histoire de mots. En fait, c'est qu'une histoire de rythme. J'ai longtemps pensé que la vie était une histoire de sentiments alors que non. C'est juste un problème de résistance. Ne plus boire n'est pas ne plus vivre, ne plus aimer, ne plus rien ressentir pour qui ou quoi que ce soit. C'est juste différent. L'énergie est remplacé par une sorte de lassitude euphorique. S'évertuer a maintenir un équilibre entre le désespoir et la routine. Vieillir c'est juste économiser, le presque tout, les gestes, les émotions, les lâchetés, c'est comme qui dirait une préparation au néant. C'est sans doute pour cela que le confinement ne m'avait pas réellement traumatisé, rester des heures, seul avec moi-même, me perdre dans les interstices de ma non-existence, ce n'était pas nouveau pour moi. Et surtout, la solitude était ma plus fidèle compagne depuis tant d'années qu'une absence totale de vie sociale m'indifférait presque totalement. Je ne voulais plus. Tout simplement. I want prefer not to. Bartleby était sans doute le personnage, le récit qui m'avait le plus marqué. C'était confortable. C'est confortable. Je regarde le gris du ciel qui baigne dans un brouillard sans fin. Ce n'est pas déprimant comme quelqu'un m'a dit ce matin. Non. C'est du gris. Le rose est la couleur des escrocs. Toutes les couleurs sont des conneries. Il ne reste que le gris. Ma vie est grise et je ne ferais rien pour la combattre. Je ne veux plus. C'est sans doute ce qui me permet d'exister.

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